2. Réflexions

J'ai toujours eu peur de la grossesse. D'ailleurs, pendant longtemps, je ne voulais pas d'enfants. Je ne me sentais pas capable d'élever un enfant et surtout, surtout, je ne voulais pas grossir. C'est bête hein. Mais je suis une ancienne (?) boulimique vomitive. J'ai eu beaucoup de mal à arrêter mes crises, à arrêter de vomir, à m'accepter, et d'ailleurs, je sais bien que ces vieux réflexes dégueulasses sont toujours quelque part, ancrés au plus profond de moi. Je suis retombée sur un billet que j'avais écrit il y a 2 ans peut-être, où je racontais qu'après un restaurant, j'avais recommencé. A vomir, 1 fois, 2, 3, tout en reproduisant exactement les mêmes gestes que je faisais lors d'une crise, à recracher de la bile, à me toucher le ventre, à pleurer.

 J'ai pourtant 31 ans aujourd'hui. Mais être adulte ne signifie pas s'être débarrassée de ses anciens démons pour autant. Et puis, est-ce que je suis assez adulte, après tout? Ça veut dire quoi être adulte ? Bref. Aujourd'hui, pourtant, je suis enceinte. De 27 semaines. Mes retrouvailles avec J. il y a 4 ans m'ont permis de me poser (trop, peut-être), et surtout, de vouloir fonder une famille avec lui. Ce désir a été plus fort que mes peurs égoïstes et malades. Alors, voilà. Je suis enceinte et dans quelques semaines, nous serons 3.
Mais de temps en temps, forcément, évidemment, mes peurs resurgissent.

 Est-ce que je serai capable de m'accepter après avoir accouché ? Pourrai-je retrouver mon poids initial ? Ces peurs se battent chaque jour avec mes désirs de future mère : je veux allaiter, je veux être un modèle sain pour ma fille, qu'elle ne subisse surtout pas ce que j'ai vécu. C'est un équilibre instable, et j'ai du mal, parfois, à ne pas paniquer malgré ma "façade". Non, devenir mère ne m'effraie pas tant que ça. En revanche, j'ai terriblement peur de ne plus redevenir "femme".
 J'ai déjà pris trop de poids, par rapport à la "norme", située entre une prise de 9 et 12 kg pour une grossesse moyenne / normale (mais putain, qu'est-ce que ça me fait chier ces normes à la con). Mon médecin généraliste, pourtant très gentil, m'a déjà dit qu'il fallait "se calmer" et ma sage-femme m'a prévenue, m'a dit de faire attention. C'est pas un problème pour le bébé, c'est surtout "pour vous", après. Oui merci, je m'en serais douté, Choupinette n'en aura rien à carrer que sa mère fasse 80 ou 50 kg. Alors, ça part de bons sentiments (?). C'est pour moi, pour que je fasse attention.

 Mais merde. Merde, merde, merde.

 J'ai pris énormément de poids dès le début, parce que j'ai retrouvé une alimentation normale, pour que mon bébé n'ait pas de problèmes. Avant (il y a 7 mois, donc), je ne prenais pas de petit- déjeuner, pas de goûter, très peu de sucres raffinés, pas de viande ni poisson et donc jamais de sauce grasse. Et d'un coup, la peur d'une malformation pour le bébé a été la plus forte. Et c'est sûr que rajouter d'un coup un petit-déjeuner, un goûter le matin, un goûter le soir, et réintroduire des aliments gras/sucrés pour avoir de la nourriture variée, ça n'a pas aidé. Alors qu'on est censé prendre très peu de poids au début, j'ai pris entre 1.5 et 2 kg par mois.

 Aujourd'hui, je pèse donc... j'en sais rien, entre 63 et 64 kg sûrement, je ne me pèse pas pour ne pas alimenter mes pensées négatives. Je me pèse juste quand je le dois, à chaque rdv avec ma sage-femme. Ce n'est pas la fin du monde. Mais c'est déjà beaucoup. Sachant que c'est pendant ce dernier trimestre qu'on prend le plus de poids, j'ai un peu peur. Non, en fait, j'ai très peur. De ne pas réussir à tout reperdre et donc, de retomber dans les bras de Mia. Or ça, je ne le veux pas, je ne peux pas me le permettre.

 Mais j'ai peur. C'est tout. Alors j'espère que parler, enfin écrire, me permettra d'évacuer cette peur. De m'apaiser un peu. De m'aider à me maîtriser, à rester raisonnable. Je l'espère vraiment.